Son séjour à Perros n’avait eu d’autre fin que d’assurer le rapt de l’enfant. Depuis plus d’un mois, Gonzalo rassemblait les renseignements indispensables. Il savait que le petit Pablo vivait sous le toit de la bonne Anna Plonévez et qu’il se rendait fréquemment chez les dames de Ker Gwevroc’h. Une impérieuse nécessité exigeait qu’il disparût du pays.

Le métis n’avait pas voulu charger Lopez de l’enlèvement. Il se méfiait de la promptitude de celui-ci à jouer du couteau et savait que plusieurs raisons l’eussent porté à se défaire du petit garçon.

En conséquence, il avait pris ses dispositions pour que celui-ci fût attiré sans violence jusqu’à une grève où lui, Gonzalo, aidé de quelques hommes sûrs, l’emporterait, bâillonné et ligotté, sur le yacht, qui cinglerait aussitôt vers des cieux plus propices aux pirateries.

« C’est pourquoi j’ai compté sur toi, Ervoan, conclut Wickham. Tu te rendras chez ta mère, tu y verras l’enfant. Je sais qu’il avait pour toi une vive affection. Il ne concevra aucune méfiance à ton endroit, et tu n’auras qu’à l’amener au lieu que je t’aurai désigné. Le reste me regarde. Acceptes-tu ? »

Ce disant, il étalait sur une table les cinq billets bleus, prix de l’affreux marché à conclure.

Le Breton hésita quelques secondes. Puis, saisissant les banknotes d’un geste brusque, il dit, d’une voix rauque :

« J’accepte. »

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